L'objectif du grand marché intérieur
L'objectif du grand marché intérieur
Une «métamorphose»1 des Communautés européennes intervient au début de la décennie suivante. La Commission adopte en 1985 un programme de réalisation d'un grand marché intérieur: le Livre blanc à l'intention du Conseil européen sur l'achèvement du marché intérieur2. Les quelques trois cent dix mesures qu'y sont énumérées, sont destinées à stimuler la reprise économique, à garantir les libertés de circulation des personnes, des biens, des services et des capitaux et à fusionner les marchés nationaux en un marché unique pour le 31 décembre 1992 au plus tard. Ainsi parle-t-on de «l'objectif 92». En pratique, il s'agit de faire disparaître les dernières frontières juridiques, fiscales ou techniques intérieures et de concrétiser toutes les ambitions laissées en suspens dans la mise en œuvre du Marché commun européen lancé en 1958. Approuvé par le Conseil européen de Milan des 29 et 30 juin 1985, ce programme implique, pour sa mise en œuvre, une réforme en profondeur des traités communautaires. Le traité portant révision, l'Acte unique européen, est signé le 17 février 1986 à Luxembourg et le 28 février 1986 à La Haye. Parmi ses principaux apports, l'extension du vote à la majorité qualifiée en lieu et place de la majorité pour les mesures à prendre par le Conseil, en particulier dans le domaine de l'harmonisation législative.
Plusieurs facteurs expliquent cette évolution.
Le blocage politique de l'Europe liée au montant de la participation financière du Royaume-Uni au financement du budget communautaire est levé lors du Conseil européen des 25 et 26 juin 1984: l'Europe peut enfin aborder de nouveaux sujets.
La première moitié des années 1980 sont aussi celles d'une prise de conscience. Les résistances nationales à l'ouverture des marchés n'ont pas permis de réaliser le programme économique quinquennal de 1977. Alors que les Communautés fêtent leur 25e anniversaire, l'économie européenne connaît un quadruple décrochage par rapport à celles nord-américaine et japonaise3. Décrochage économique, avec une reprise modeste. Décrochage financier, en raison d'une insuffisance et d'une inadéquation des moyens de financement de l'activité économique. Décrochage social, avec un taux de chômage qui baisse peu. Et décrochage technologique, avec une présence commerciale et une compétitivité moindre dans les secteurs en pleine croissance comme l'informatique. Ainsi, entre 1982 et 1987, le taux de croissance moyen en Europe passe d'une valeur négative à 2,4 %, tandis qu'il croit de 2,5 % à 6,7 % aux États-Unis.
1Dinan, Desmond, The European Community, 1978-1983, Annals of the American Academy of Political and Social Sciences, January 1994, vol. 531, The European Community: To Maastricht and beyond, p. 11.
2Commission, Bruxelles, 14 juin 1985, COM(85) 310 final.
3Voir en particulier les inquiétudes exprimées par le Conseil européen des 29 et 30 mars 1982 à Bruxelles, Doc/82/1. [online] http://europa.eu/rapid/press-release_DOC-82-1_fr.htm. Consulté le 10 octobre 2013.