Le cinquième élargissement

Le cinquième élargissement


Après la chute des régimes communistes, les pays de l’ancien bloc de l’Est ont manifesté leur volonté d’adhérer à la Communauté européenne. Or, à cette époque, l’héritage des systèmes et structures socio-économiques rendait difficile une intégration rapide des pays de l’Est dans la Communauté. Aussi, pour les aider à évoluer vers la démocratie libérale et l’économie de marché, la Communauté, puis l’Union européenne, ont conclu avec eux des accords d’association dans la perspective d'une future adhésion. Le Conseil européen d’Essen (9-10 décembre 1994) a défini une stratégie de « préadhésion » pour préparer les pays d’Europe centrale et orientale (PECO) à l’intégration progressive de l’acquis communautaire. Par ailleurs, il «confirme que la prochaine étape de l'élargissement de l'Union concernera Chypre et Malte». Le Conseil européen de Copenhague (21-22 juin 1993) avait auparavant précisé les critères politiques et économiques à remplir en vue d’adhérer à l’Union européenne dans la « liste de Copenhague ».


Dès lors, les candidatures se succèdent : Hongrie (31 mars 1994), Pologne (5 avril 1994), Roumanie (22 juin 1995), Slovaquie (27 juin 1995), Lettonie (13 octobre 1995), Estonie (24 novembre 1995), Lituanie (8 décembre 1995), Bulgarie (14 décembre 1995), République tchèque (17 janvier 1996), Slovénie (10 juin 1996). Le Conseil européen de Madrid (15-16 décembre 1995) fixe un calendrier. L’ouverture des négociations d’adhésion se fera six mois après l’achèvement de la conférence intergouvernementale (CIG) conduisant au traité d’Amsterdam. Elle concernera Chypre, bénéficiaire d’un accord d’association avec la Communauté économique européenne (CEE) depuis le 19 décembre 1972 et dont la candidature a été déposée le 3 juillet 1990, et Malte, associée à la CEE depuis le 5 décembre 1970 et candidate le 16 juillet 1990, ainsi que les dix pays associés et candidats d’Europe centrale et orientale. La Commission européenne est chargée par le Conseil de lui faire rapport sur les différentes candidatures.


Aussitôt après le Conseil européen d’Amsterdam (16-17 juin 1997) et sans attendre la signature du traité d’Amsterdam (le 2 octobre 1997), la Commission Santer présente son rapport le 16 juillet 1997 avec l’ « Agenda 2000 – pour une Union plus forte et plus large » comprenant dix avis sur les demandes d’adhésion des PECO. Analysant la capacité de chaque État à remplir les critères économiques et politiques de Copenhague, la Commission estime que seul un premier groupe de six pays pourrait être qualifié pour adhérer vers 2002-2003 et suggère de ne commencer la négociation qu’avec ceux-ci (Chypre, Hongrie, Pologne, République tchèque, Slovénie et Estonie). Mais le Conseil européen de Luxembourg (12-13 décembre 1997), voulant éviter des discriminations entre les candidats, décide d’associer les dix États candidats d'Europe centrale et orientale ainsi que Chypre au processus d’élargissement tout en ne commençant les négociations qu’avec les six pays sélectionnés par la Commission.


Une conférence européenne annuelle des chefs d’État ou de gouvernement des États membres de l’Union et des États candidats est instituée comme enceinte multilatérale de coopération politique pour traiter les questions d’intérêt général et développer la coopération dans les domaines de la PESC, de la Justice et des Affaires intérieures et de la coopération économique et régionale. La première conférence se tient le 12 mars 1998 à Londres sous présidence britannique. Elle condamne la répression serbe au Kosovo et décide l’association des pays candidats au plan d’action des Quinze contre la criminalité.


Les négociations sont lancées le 30 mars 1998 à Bruxelles à l’occasion de la réunion ministérielle ouvrant le processus d’adhésion à l’UE des dix PECO ainsi que de Chypre. Les négociations sont conduites par le Conseil assisté de la Commission. Celle-ci dresse d’abord l’état des lieux de l’acquis communautaire, c’est-à-dire des textes législatifs que les futurs membres devront incorporer dans leurs lois nationales, soit environ 20.000 actes juridiques représentant 80.000 pages du Journal officiel des Communautés européennes. Un « partenariat pour l’adhésion » est établi entre l’Union et chaque pays candidat qui reçoit une « feuille de route » précisant les objectifs à atteindre pour être en mesure d’adhérer et une aide financière de « préadhésion » conditionnée au respect des engagements. La Commission, depuis la fin de 1998, fait des rapports réguliers au Conseil sur les progrès réalisés par chaque État candidat.


Les conférences d'adhésion commencent le 10 novembre 1999 sous la forme de six conférences intergouvernementales distinctes avec chacun des six États retenus. Le Conseil européen d’Helsinki (10-11 décembre 1999) décide d’en ouvrir également avec les six autres candidats (Roumanie, Bulgarie, Slovaquie, Lettonie, Lituanie ainsi que Malte qui a renouvelé officiellement sa demande d’adhésion en 1998 sous le gouvernement pro-européen de Fenech Adami alors que les socialistes maltais avaient préféré geler les négociations en 1996). Elles commenceront en février 2000. De plus, le Conseil reconnaît les pays de l’ex-Yougoslavie comme « candidats potentiels » à l’adhésion à l’Union.


Le Conseil européen d’Helsinki prend également une décision importante en ce qui concerne la Turquie. Celle-ci avait signé avec la Communauté économique européenne un traité d’association le 12 septembre 1963, complété par un protocole additionnel en 1970. Ce traité prévoyait l’adhésion, après une période de trente ans. La Turquie avait déposé une demande à cet effet le 14 avril 1987. Le traité de 1963 a été remplacé par l’accord d’union douanière de 1995, effectif depuis le 1er janvier 1996. Mais le Conseil européen de Luxembourg (12-13 décembre 1997) n’avait pas retenu la Turquie parmi les candidats à l’adhésion pour des raisons diverses : insuffisances de la démocratie, risque d’afflux des travailleurs turcs, problème de Chypre dont la partie nord reste séparée du Sud de l’île après l’intervention de l’armée turque en 1974et érigée par la suite en République turque de Chypre-nord reconnue par la seule Turquie en 1983. D’où l’hostilité des Grecs, à cette époque, à l’admission de la Turquie dans l’Union. A Helsinki, les Quinze décident de donner une satisfaction à la Turquie en lui accordant le statut de « pays candidat », avec les avantages de la préadhésion, sans pour autant ouvrir des négociations d’adhésion ni fixer de date à cet effet.


L’accélération des négociations d’adhésion avec les douze États candidats est décidée par le Conseil européen de Nice (7-9 décembre 2000) qui définit une stratégie basée sur un calendrier précisant les différents chapitres à traiter pour les deux années à venir mais qui ne fixe pas d’échéances d’adhésion demandées par les candidats. Le Parlement européen ayant demandé que les nouveaux membres participent aux élections européennes de juin 2004 et la Commission ayant formulé cette proposition, le Conseil européen de Göteborg (15-16 juin 2001) fixe comme objectif de clôturer la négociation avec les pays qui seraient prêts avant la fin de 2002 afin de leur permettre de participer en tant qu’États membres aux élections européennes. La Commission, qui fait régulièrement rapport sur le rythme d’avancement des négociations et des réformes réalisées dans les pays candidats, estime que Chypre, l’Estonie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie, Malte, la Pologne, la Slovaquie, la République tchèque et la Slovénie pourraient être prêts. Seules la Bulgarie et la Roumanie devraient encore progresser. Le Conseil européen de Laeken (14-15 décembre 2001) se déclare d’accord avec le rapport de la Commission. La Commission estime que si les États candidats poursuivent leurs efforts de mise à niveau avec l’Union européenne, en particulier dans le domaine des capacités administratives et judiciaires, la rédaction des traités d’adhésion pourrait commencer au premier semestre 2002.



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