Parlement européen

Le Parlement européen

Le Parlement européen est la première des sept institutions de l'Union européenne que mentionne l'article 13 du traité sur l'Union européenne (traité UE). Il représente les intérêts des citoyens de l'Union européenne. Il contribue au fonctionnement de l'Union selon le principe de la démocratie représentative1. La participation effective du Parlement européen au processus législatif communautaire reflète, au niveau de l'Union, «le principe démocratique fondamental, selon lequel les peuples participent à l'exercice du pouvoir par l'intermédiaire d'une assemblée représentative»2. Le principe démocratique signifie aussi que le pouvoir d'adopter un acte de l'Union susceptible de modifier les éléments non essentiels d'un acte législatif doive être exercé par une institution européenne démocratiquement responsable3.

Le régime juridique du Parlement européen est éclaté entre l'article 14 du traité UE qui en définit les principales caractéristiques et les articles 223 à 234 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (traité FUE) qui détaillent les règles de fonctionnement et une série de dispositions qui le mentionnent explicitement ou implicitement en sa qualité d'institution. D'autres éléments de son régime se trouvent dans les protocoles annexés aux traités, dont le protocole (n° 2) sur l'application des principes de subsidiarité et de proportionnalité ou celui (n° 7) sur les privilèges et immunités. Le système électoral du suffrage universel direct des membres du Parlement européen est régi par les traités (articles 14 du traité UE et 223 du traité FUE) et par la décision des représentants des États membres du 20 septembre 1976 et de l'acte qui lui est annexé4. La répartition des sièges par État est définie par la décision du Conseil européen du 28 juin 20135. Le statut des députés est détaillé par la décision du Parlement du 28 septembre 20056. Un important contentieux entre le Parlement et les autres institutions communautaires, notamment dans les années 1980, a contribué à améliorer la position de l'Assemblée au sein du système institutionnel.

Le Parlement européen ne dispose pas de la personnalité morale.

Les origines du Parlement européen

L'idée d'une assemblée parlementaire européenne qui exprime l'opinion publique européenne est exposée lors du Congrès de La Haye des 7 et 10 mai 1948. Élus au sein des parlements nationaux ou dehors, ses députés devaient recommander les mesures nécessaires au rétablissement politique et économique de l'unité nécessaire de l'Europe. À cet effet, le Congrès prévoyait qu'une telle assemblée puisse examiner les problèmes juridiques et constitutionnels posés par la création d'une union ou d'une fédération européenne. Le Conseil de l'Europe reprend le principe d'une assemblée parlementaire tout en en édulcorant significativement les responsabilités. L'assemblée est composée de représentants des États, dont le mode désignation est laissé à la discrétion des gouvernements (ex-article 26, actuel article 25 du statut). En 1951, le statut du Conseil de l'Europe est révisé: l'assemblée est dorénavant composée de représentants de chaque État membre élus par son Parlement ou désignés par une procédure fixée par celui-ci.

Dans l'ordre juridique communautaire, le Parlement européen trouve son origine dans l’Assemblée commune, institution parlementaire purement consultative créée par le traité instituant la Communauté européenne du charbon et de l'acier (CECA) de 1951.

L'idée d'une assemblée parlementaire n'apparaît pas dans la déclaration du 9 mai 1950 prononcée par le ministre français des Affaires étrangères, Robert Schuman. Elle est mise en avant par Jean Monnet, ainsi que par les délégations belge et italienne, le second jour des négociations du traité afin de contrôler la Haute Autorité et de lui faire contrepoids. Les constituants lui donne le nom d'Assemblée commune dans le traité CECA.

L'établissement de cette assemblée satisfait la nécessité d'une légitimation démocratique de la CECA. Même si ses pouvoirs sont limités, elle est une assemblée parlementaire, représentative et souveraine. Le traité CECA (article 20) parle de représentants des peuples, expression qui marque bien la volonté de ses auteurs de distinguer l’Assemblée commune d’une simple assemblée d’organisation internationale classique, composée de représentants des gouvernements nationaux. L’Assemblée commune est ainsi la première assemblée internationale de type parlementaire. Aux termes de l’article 21 du traité CECA, elle se compose de «délégués que les Parlements sont appelés à désigner en leur sein une fois par an, ou élus au suffrage universel direct, selon la procédure fixée par chaque Haute Partie Contractante».

Signé le 26 mai 1952, le traité créant la Communauté européenne de défense (CED) franchit un pas supplémentaire. Son article 38 prévoit que l'Assemblée commune de la CECA étudie la constitution d'une Assemblée de la Communauté européenne de défense, «élue sur une base démocratique». Le 10 septembre 1952, les ministres des Affaires étrangères des Six invitent les membres de l'Assemblée commune à préparer le projet de traité instituant une Communauté politique européenne. Pour l'occasion, l'Assemblée commune est invitée à appliquer de façon anticipée les règles de composition de l'Assemblée de la CED: les délégations française, allemande et italienne de l'Assemblée consultative du Conseil de l'Europe doivent chacune désigner trois membres qui ne sont pas aussi déjà membres de l'Assemblée commune. Ces neuf membres s'ajoutent aux 78 membres de l'Assemblée commune pour former une Assemblée ad hoc. Elle se réunit au Conseil de l'Europe. L'Assemblée ad hoc adopte le projet de traité portant statut de la Communauté européenne le 10 mars 1953. Son article 11 prévoit la création d'un parlement bicaméral, dont la chambre basse est formée de «députés représentant les peuples unis dans la Communauté»; ils sont élus au suffrage universel direct (article 13). Le projet ne voit pas le jour, à la suite de son rejet par l'Assemblée nationale française le 30 août 1954.

À la naissance de la Communauté économique européenne (CEE) et de la Communauté européenne de l'énergie atomique (CEEA ou Euratom) en 1957, il est convenu qu'une assemblée unique exerce les pouvoirs et compétences que les traités CEE et CEEA lui attribuent. De même, l'Assemblée unique remplace l'Assemblée commune de la CECA et exerce ses pouvoirs et compétences (articles 1er et 2 de la Convention relative à certaines institutions communes aux Communautés européennes).

L'Assemblée unique siège pour la première fois du 19 au 21 mars 1958. Dès sa première session, elle prend le nom d'Assemblée parlementaire européenne en français, d'Assemblea parlementara en italien et, de façon plus significative, d'Europees Parlament en néerlandais et d'Europäische Parlament en allemand. Le 30 mars 1962, l'Assemblée décide d'harmoniser son nom dans les différentes langues officielles et opte pour Parlement européen en français et Parlemento europeo en italien7. Cette appellation est officialisée par l'Acte unique européen en 1986 (article 2). Le traité reconnaît dans son préambule que le Parlement européen est un «moyen d'expression indispensable» des peuples démocratiques européens.

Élu au suffrage universel direct depuis 1979, le Parlement européen voit ses pouvoirs renforcés au fur et à mesure que la construction européenne évolue. Le traité de Lisbonne, signé le 13 décembre 2007 et entré en vigueur le 1er décembre 2009, parachève cette évolution. Il attribue au Parlement européen l'exercice des fonctions législatives et budgétaires, conjointement avec le Conseil. La procédure législative associant le Parlement européen et le Conseil devient la procédure législative ordinaire, c'est-à-dire celle s'appliquant par défaut, sauf disposition contraire des traités (art. 289, par. 2, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne). En outre, il accorde une place accrue aux parlements nationaux (article 12 du traité UE et protocole n° 1 annexé aux traités), conformément au système constitutionnel à double niveau que constitue l'Union européenne. Le double fondement de la légitimité démocratique de l'Union est affirmée: les citoyens sont directement représentés, au niveau de l'Union, au Parlement européen. Les États membres sont représentés au Conseil européen par leur chef d'État ou de gouvernement et au Conseil par leurs gouvernements, eux-mêmes démocratiquement responsables, soit devant leurs parlements nationaux, soit devant leurs citoyens (article 10, par. 2, du traité UE). Le traité de Lisbonne est «le traité des parlements»8.

1Article 10, paragraphe 2, du traité UE.

2Cour de justice des Communautés européennes, arrêt du 29 octobre 1980, Roquette frères contre Conseil dit «Isoglucose», aff. 138/79, Rec. p. 3333, point 33; également: arrêt du 11 juin 1991, Commission contre Conseil dit «Dioxyde de titane», aff. C-300/89, Rec. p. I-2867, point 20.

3Cour de justice, conclusions de l'avocat général M. Niilo Jääskinen présentées le 12 septembre 2013 dans l'affaire C-270/12, Royaume-Uni contre Conseil et Parlement dit «Ventes à découvert», point 85.

4Décision (76/787/CECA, CEE, Euratom) des représentants des États membres réunis au sein du Conseil, du 20 septembre 1976, relative à l'Acte portant élection des représentants à l'Assemblée au suffrage universel direct, JOCE L 278 du 8 octobre 1976, p. 1. L'acte a été modifié en dernier lieu par la décision (2002/772/CE) du Conseil du 25 juin 2002 et du 23 septembre 2002 (JOCE L 283 du 21 octobre 2002, p. 1).

5Décision (2013/312/UE) du Conseil européen fixant la composition du Parlement européen. JOUE L 181 du 29 juin 2013, p. 57.

6Décision (2005/684/CE, Euratom) du Parlement européen du 28 septembre 2005 portant adoption du statut des députés au Parlement européen, JOUE L 262 du 7 octobre 2005, p. 1.

7Jacqué, Jean-Paul. Parlement européen. In Répertoire communautaire Dalloz, décembre 2011, art. 2.

8Lammert, Norbert. Europa-Rede, Humboldt Universität zu Berlin. Berlin, 1er décembre 2009.

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