Note méthodologique


Question et hypothèse de recherche


La ePublication thématique «Jeux et enjeux diplomatiques franco-britanniques au sein de l’UEO (1954-1982)» est le résultat d’une exploitation scientifique des archives de l’UEO structurée autour de la question de recherche suivante: quelles ont été les positions française et britannique poursuivies dans l’enceinte de l’UEO sur des sujets majeurs de la sécurité et de la défense européennes?


La ePublication retient comme hypothèse de recherche que les positions défendues par la France comme par le Royaume-Uni au sein de l’UEO s’inscrivent dans la continuité de leurs orientations générales concernant le développement de la défense européenne: Paris soutient un dispositif proprement européen, rattaché aux Communautés européennes (CE), tandis que Londres privilégie l’OTAN. Les recherches documentaires ont permis d’examiner comment ces orientations stratégiques distinctes ont structuré les débats au sein de l’UEO sur les grandes questions de défense et de sécurité qui ont jalonné la période 1954-1982[1]. L’analyse des échanges entre le Conseil et l’Assemblée de l’UEO[2] sur les sujets de défense rend compte, de façon complémentaire, des dynamiques politiques intra-institutionnelles et de leurs influences sur les rapports franco-britanniques. L’ensemble des débats au sein de l’UEO, entre ses États membres ou ses organes politiques, fournissent une mise en perspective de la dépendance du processus d’établissement d’une défense européenne à l’égard des impulsions (ou des absences d’impulsion) du couple franco-britannique.


De façon plus spécifique, la sélection documentaire retenue dans la ePublication repose en premier chef sur une consultation et une analyse méthodique des archives de l’UEO. Celles-ci sont contrastées avec des documents diplomatiques nationaux. Cette confrontation vise d’une part, à identifier les constantes/variantes des positions de la France et du Royaume-Uni en fonction du cadre où elles sont exprimées (national/multilatéral), ainsi que les convergences/divergences entre les positions des deux pays. D’autre part, l’analyse de discours permet d’évaluer le rôle de l’organisation et ses compétences au regard de la reconnaissance d’une légitimité d’action par la France et/ou le Royaume-Uni ou, inversement, par la constatation d’expressions d’unilatéralité ou de l’importance d’autres organisations dans les thématiques traitées. Ces expressions sont attribuées principalement aux acteurs nationaux, ministres, ambassadeurs, et accessoirement aux organes mêmes de l’UEO. L’analyse de la documentation, et en particulier des discours des ministres ou des ambassadeurs, est opérée pour chacune des quatre thématiques retenues dans la ePublication.


La ePublication thématique «Jeux et enjeux diplomatiques franco-britanniques au sein de l’UEO (1954-1982)» est complétée par un article scientifique sous la forme d’un ePaper. Celui-ci développe et dégage les conclusions d’une analyse originale basée sur une sélection de ressources publiées au titre de la ePublication. Appliquant les principes méthodologiques classiques des sciences sociales et humaines, l’analyse bénéficie de l’apport des outils et des méthodologies issues des humanités numériques et plus particulièrement d’une édition TEI (Text Encoding Initiative)[3].


L’encodage XML-TEI appliqué, à titre expérimental, à un ensemble de documents de la section sur les questions liées à la base industrielle et technologique de défense (BITD), a pour but de répondre à nos questions de recherche, en identifiant des «patrons linguistiques» concernant la question de l’armement dans les discours des intervenants identifiés, notamment les représentants britanniques et français et les représentants institutionnels, à savoir les représentants du Conseil (président de session), de l'Agence pour le contrôle des armements (ACA) et du Comité permanent des armements (CPA). Puis, éventuellement, de parvenir à de nouvelles pistes de recherche.


L’article aborde aussi les différents sujets de sécurité et de défense qui illustrent le traitement de la thématique des relations franco-britanniques au sein de l’UEO et s’attache à fournir une réponse argumentée à la question de recherche de la ePublication thématique.



Structure de la ePublication 


La ePublication est construite autour d’une approche thématique, chaque thème étant développé de façon chronologique. Sa structure est le reflet synthétique des principales problématiques qui ont structuré les relations diplomatiques franco-britanniques entre 1954 et 1982, ainsi qu’il ressort d’une analyse croisée des documents de l’UEO – en particulier les comptes rendus de l’Assemblée et les documents issus du Conseil permanent de l’UEO et d’autres sources primaires (archives diplomatiques françaises, britanniques, américaines; entretiens de grands témoins) et secondaires.


La ePublication s’ouvre par une présentation générale de l’UEO qui recouvre sa création, son organisation, ses pouvoirs, son fonctionnement et sa dissolution. La ePublication contient également une chronologie interactive qui reprend l’ensemble des éléments qui ont marqué la vie de l’UEO, ainsi que les événements importants qui ont marqué les relations franco-britanniques sur la période 1954-1982.


La question de recherche est adressée à travers quatre études de cas qui forment autant de sections thématiques de la ePublication. La première étude de cas examine l’articulation entre l’UEO et l’OTAN en distinguant la période de 1954 à 1966 de celle de 1966 à 1982 marquée par la non-participation de la France au commandement militaire intégré de l’OTAN. La deuxième section s’intéresse à la question nucléaire à travers les enjeux de la dissuasion, au désarmement et à la crise des euromissiles. Objets de la troisième section, les questions liées à la base industrielle et technologique de défense (BIDT) se focalisent d’une part sur la conception et la production et, d’autre part, sur la question du contrôle des armements[4]. Finalement, la quatrième étude de cas met en lumière la question des opérations «hors zone» de l’OTAN (de l’Afrique occidentale à l’Afghanistan).


Chaque section thématique se décompose en plusieurs sous-sections. Chaque section et sous-section débute par un texte introductif qui, de façon synthétique, contextualise et présente les faits importants pour chacune des questions traitées, les enjeux et positions des principaux acteurs étatiques, la France et le Royaume-Uni. Les politiques conduites ou prises de position des États-Unis et de l’URSS à l’égard des différents sujets abordés sont considérées, afin de tenir compte du rôle incontournable de ces deux pays pendant la période examinée. Un état des lieux de l’action de l’UEO est exposé pour chacune des thématiques.


Au sein de chaque section et sous-section, les documents sélectionnés sont présentés dans un ordre chronologique. Ils disposent tous de références bibliographiques qui en assurent la citation et sont accompagnés de légendes. Ces dernières replacent les documents dans leur contexte et soulignent les éléments pertinents en rapport avec le thème ou sous-thème auquel les documents se rattachent.



Limitations du champ de recherche


La ePublication thématique ainsi que le ePaper couvrent la période de 1954 à 1982. La sélection des documents exclut l’Union occidentale pour se concentrer sur l’UEO[5]. La limite supérieure de la période analysée est dépendante des conditions de communication au public des documents diplomatiques. Conformément à la décision C(11)05 finale du Conseil permanent de l’UEO du 11 mai 2011, seuls les documents de plus de trente ans sont communicables et publiables. Engagé en 2012, le projet s’arrête par conséquent à l’année 1982.


Le champ de recherche exclue également le recueil de documents et une analyse systématiques de la dimension purement bilatérale des relations franco-britanniques qui n’est, pourtant pas ignorée, compte tenu de son pouvoir explicatif en matière de politique étrangère et de défense. Cependant, la dimension multilatérale est privilégiée. De même, les relations bilatérales de la France et du Royaume-Uni avec d’autres acteurs étatiques ont été considérées dans la mesure où les différents documents diplomatiques ont indiqué une influence sur les positions française et britannique dans les questions traitées.


Dans la mesure où l’analyse est centrée sur l’UEO et ses activités, ainsi que sur les interactions entre la France et le Royaume-Uni dans son cadre, les archives d’autres organisations comme l’OTAN ou les CE/l’UE n’ont pas été consultées. Les références faites à certains documents provenant de ces autres organisations découlent du fait qu’ils ont été retrouvés dans les archives de l’UEO ou qu’il s’agit de traités et d’accords ayant impacté l’UEO et/ou ses États membres.



Principes gouvernant la sélection documentaire


Une recherche systématique a été conduite dans la base de données du fonds d’archives de l’UEO. Elle a permis de réunir un ensemble de documents représentatifs des positions défendues par la France et le Royaume-Uni au sein de l’UEO, sur les différents thèmes retenus.


Les sections suivantes du fonds d’archives UEO ont fait l’objet d’une consultation spécifique: Interim Period (période intérimaire), Brussels Treaty Organisation (BTO), Secretariat-General/Council’s archives (Secrétariat général/Conseil de l’UEO 1954-1987), Armament Bodies (organes d’armement), Agence pour le contrôle des armements (ACA) et Comité permanent des armements (CPA).


Pour la France, les archives proviennent de la collection des documents diplomatiques français jusqu’au premier semestre 1967 et de la consultation au Centre des archives diplomatiques de Nantes du fond de l’Ambassade de France à Londres, série UEO pour la période de 1954 à 1982. Pour le Royaume-Uni, les documents proviennent des Archives nationales de Kew, tant pour la consultation internet que pour la consultation sur place.


En complément des documents diplomatiques ou institutionnels, la ePublication inclut des articles de presse provenant de quotidiens nationaux comme Le Monde, Le Monde Diplomatique, pour la France et The Guardian et The Observer pour le Royaume-Uni, ainsi que quelques dépêches de l’Agence Europe et Atlantic News – celles-ci sont issues des archives UEO.


Toutes les sections, à l’exception de la «BITD: la conception et production d’armements», comptent également des photos qui illustrent des événements clés de chaque étude de cas.


Finalement, certaines sections comportent des cartes pour une visualisation systématisée, ainsi que des extraits de témoignages recueillis par le CVCE auprès de personnalités qui, dans leur parcours professionnel, ont exercé des fonctions dans un des organes de l’UEO ou bien qui, à un moment ou à un autre, ont participé à des activités de l’UEO. La ePublication comprend des extraits d’interviews de M. Charles Goerens, ancien président de l’Assemblée de l’UEO et M. Willem Van Eekelen, ancien secrétaire général de l’UEO et de l’Ambassadeur Francis Gutmann, ancien secrétaire général du ministère français des Affaires étrangères.


Si la ePublication présente les facteurs qui sont à l’origine du mouvement de la relance de l’UEO en 1984, cet événement dépasse le cadre temporel retenu, en conséquence, les années 1983 et 1984 ne font l’objet d’aucun développement.


La sélection des ressources documentaires a été opérée conformément aux critères suivants:


- pertinence du contenu informatif des ressources au regard de la problématique générale de la ePublication et des différentes thématiques abordées;


- respect d’un équilibre entre les décennies – selon les thèmes analysés, la quantité de documents trouvés est moindre – p. ex: crise des euromissiles ou encore la période antérieure à la sortie de la France du commandement intégré de l’OTAN; respect d’un équilibre entre les quatre sections. Il est important de souligner que certains documents n’ont pu être consultés et/ou publiés, compte tenu de leur nature particulièrement sensible, par exemple les documents diplomatiques français relatifs aux questions nucléaires;


- une prévalence des documents provenant des archives de l’UEO et un équilibre parmi les autres types de documents;


- la fiabilité des sources;


- la diversité de nature (documents institutionnels, correspondances diplomatiques, autobiographies/biographies, articles de presse,…);


- la diversité de discipline (documents politiques, juridiques,…);


- la diversité de format des documents (textes, images, enregistrements audiovisuels, schémas,…).



[1] Éric Remacle fait d’ailleurs référence à l’instrumentalisation de l’UEO par ces deux États qu’il désigne d’«États-leaders successifs» au sein de l’organisation. REMACLE, Éric. L’Union (de l’Europe) occidentale durant la guerre froide (1948-1989). In REMACLE, Éric et WINAND, Pascaline (dir.). L’Amérique, l’Europe, l’Afrique (1945-1973). Bruxelles: P.I.E. Peter-Lang, 2009, p. 197.

[2] Parfois réunie au niveau des ambassadeurs et parfois au niveau des ministres.

[3] Voir http://www.tei-c.org/.

[4] Les deuxième et troisième sections sont partiellement inspirées de BRIGOT, André (dir.). France-Grande Bretagne : consultations sur la défense et la sécurité. CIRPES-EHESS/EPPI-Warwick University, 1994, 166 p.

[5] Pour des questions d’ouverture et de continuité de la réflexion, quelques documents sont légèrement antérieurs (1953) ou postérieurs (1983) à la période analysée.

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