La réforme du budget communautaire: les paquets Delors

La réforme du budget communautaire: les paquets Delors


La crise budgétaire


Au début des années 80, la réforme du budget de la Communauté européenne devient indispensable.


En effet une véritable crise budgétaire se développe. Les dépenses ne cessent de croître. La politique agricole commune coûte de plus en plus cher du fait de la surproduction chronique des produits bénéficiant d’une garantie de prix et représente une part excessive du budget total (70 %). L’élargissement de la Communauté à la Grèce, au Portugal et à l’Espagne étende à ces pays les subventions agricoles et les aides régionales. Le budget communautaire double en six ans (18,4 milliards d’écus en 1980, 36,2 en 1987). Or, les recettes s’avèrent insuffisantes. Des trois «ressources propres», les deux premières (droits de douanes sur les importations et prélèvements agricoles) ne progressent plus en raison des désarmements tarifaires successifs et de l’évolution vers l’autosuffisance alimentaire de la Communauté. D’où la nécessité d’augmenter la troisième ressource basée sur la taxe sur la valeur ajoutée (TVA) plafonnée à 1 % puis relevée à 1,4 % et mal acceptée par les pays membres les moins développés. Les États membres sont donc obligés de combler le déficit budgétaire par des contributions nationales sous forme d’«avances», pas toutes remboursables, ce qui est contradictoire avec la notion de «ressources propres» de la Communauté.


À ces difficultés comptables s’ajoute une crise institutionnelle, le Parlement européen élu au suffrage universel direct en 1979 cherchant à accroître son rôle dans la procédure budgétaire pratiquement limitée aux propositions de la Commission et aux décisions du Conseil des ministres. Il ne peut, à cette fin, qu’utiliser son droit d’arrêter le budget global. Il en résulte des conflits à répétition, retardant de plusieurs mois l’adoption du budget pour l’année en cours. Il faut mettre un terme à cette guérilla budgétaire.


Une réforme du système financier et un renforcement de la discipline budgétaire s’avèrent nécessaires. D’autant que l’adoption de l’Acte unique européen (AUE) qui fixent de nouveaux objectifs économiques et sociaux, accroît les dépenses structurelles visant à développer la cohésion de la Communauté.


Les paquets Delors I et II


La réforme du budget communautaire est réalisée sous l'impulsion de Jacques Delors, président de la Commission depuis janvier 1985. C’est une communication de la Commission présentée en 1987 et communément appelée paquet Delors I qui en est le point de départ. En 1992, une autre communication de la Commission qualifiée de paquet Delors II poursuit la réforme entreprise en 1988.


Le paquet Delors I aboutit aux réformes de 1988 qui visent deux objectifs.


D’abord garantir le financement du budget communautaire. À cet effet, il est créé une quatrième ressource assise sur le PNB des États membres. Elle est calculée par différence entre les dépenses et le produit des «ressources propres». C’est donc une ressource d’appoint destinée à équilibrer le budget communautaire. Toutefois, les ressources propres «traditionnelles» s’amenuisent et on constate que les contributions nationales fondées sur le PNB des États membres prennent de plus en plus d'importance. Par ailleurs toujours dans le but de garantir la sécurité budgétaire, l'ensemble des ressources de la Communauté est désormais plafonné à un pourcentage de son PNB : 1,15 % en 1988 jusqu’à atteindre 1,20 % en 1992.


Le second objectif tend à améliorer le déroulement de la procédure budgétaire annuelle et donc mettre fin à la guérilla budgétaire. Il est réalisé grâce à la conclusion d’un accord interinstitutionnel entre le Conseil, la Commission et le Parlement européen, le 29 juin 1988. Cet accord définit des règles de discipline budgétaire renforcée et fixe des perspectives financières pour une durée de cinq ans (1988-1992). Les perspectives financières indiquent l’ampleur maximale et la composition des dépenses prévisibles de la Communauté pour une période donnée. Elles traduisent ainsi les priorités retenues dans la conduite des politiques communautaires et fixent les limites de l’évolution des dépenses dans le respect du plafond des ressources propres. Ainsi, le taux de croissance des garanties agricoles est limité à 74 % du taux de croissance annuel du PNB communautaire. En revanche, les dotations des politiques structurelles sont doublées entre 1987 et 1993, passant ainsi de 17,2 % des dépenses à 27 %.


Après cinq ans de fonctionnement satisfaisant, la Commission présente, en 1992, une nouvelle communication: le paquet Delors II. Celui-ci suggère de renouveler l’accord interinstitutionnel et notamment l’idée des perspectives financières. Le 23 octobre 1993, l’accord interinstitutionnel est conclu. Dans un contexte économique déprimé, il prévoit des perspectives financières étalées non plus sur cinq ans mais sur sept ans (1993-1999). Les orientations précédentes sont poursuivies et les défis ambitieux liés à la signature du traité sur l’Union européenne sont pris en compte : freinage des dépenses agricoles suite à la réforme de la PAC en mai 1992, nouveau doublement des Fonds structurels avec l’institution d’un Fonds de cohésion pour les pays les moins riches de la Communauté, réalisation de l'Union économique et monétaire (UEM). En ce qui concerne le volet des ressources propres, le paquet Delors II conduit à la décision du 31 octobre 1994 qui fixe le plafond des ressources à 1,20 % du PNB communautaire en 1993 pour atteindre 1,27 % en 1999. En outre, la décision prévoit de réduire le taux d’appel de la ressource TVA qui passe de 1,4 % à 1 % entre 1995 et 1999, ce qui a pour conséquence d’alourdir encore la part de la quatrième ressource fondée sur le PNB des États membres.

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