Le groupe de Visegrad et l'ALECE
Le groupe de Visegrad et l’accord de libre-échange centre-européen (ALECE)
Né de la volonté de s’affranchir de l’héritage communiste et d’accomplir les réformes nécessaires dans la perspective d’une adhésion totale aux institutions euro-atlantiques, le groupe de Visegrad est constitué le 15 février 1991 lors de la réunion de József Antall, Premier ministre de Hongrie, Lech Walesa, président de la Pologne et Václav Havel, président de la Tchécoslovaquie dans la ville hongroise de Visegrád.
Historiquement, le groupe de Visegrad trouve son origine en 1335 lorsque Jean Ier de Luxembourg, roi de Bohème, Charles Robert, roi de Hongrie et Casimir III, roi de Pologne, se rencontrent à Visegrád afin d’intensifier l’amitié et la coopération entre les trois royaumes d’Europe centrale. La déclaration de Visegrad de 1991 s’insère dans cette tradition de collaboration entre pays voisins partageant un même destin. Suite à la partition de la Tchécoslovaquie en deux États distincts le 1er janvier 1993, la République tchèque et la Slovaquie deviennent le troisième et quatrième membre du groupe. Le «Triangle de Visegrad» (Budapest, Prague, Varsovie) se transforme ainsi en «Visegrad 4» ou «V4» (Budapest, Bratislava, Prague, Varsovie).
Réunis par une proximité géographique, culturelle et historique, et partageant des vues similaires sur l’avenir de l’Europe centrale après la chute des régimes communistes, ces quatre pays mettent en place une coopération politique et économique étroite afin de mieux défendre leurs intérêts communs à l’échelle européenne. La vitalité du groupe se concrétise par la tenue de nombreux sommets à différents niveaux dont le principal est celui des Premiers ministres qui se tient annuellement dans le pays assurant la présidence du groupe. Chaque État membre assure la présidence tournante pour une durée d’une année et est chargé d’élaborer un plan d’action annuel. La seule structure permanente liée au groupe est le fond de Visegrad, créé en 2000 et dont le siège est établi à Bratislava, destiné principalement à financer des projets d’ONG et à stimuler les échanges interculturels entre les pays membres.
Rapidement, l’action concertée du V4 a contribué au démantèlement du Pacte de Varsovie, à la suppression du COMECON et à la consolidation du processus de transition démocratique. L’un des objectifs du groupe de Visegrad est de stimuler les échanges commerciaux entre les pays signataires. À cet effet, les chefs d’État ou de gouvernement signent le 21 décembre 1991 à Cracovie l’accord de libre-échange centre-européen (ALECE), entré en vigueur le 1er mars 1993. Vitrine de la coopération régionale en Europe centrale, cette zone de libre-échange a été mise en place progressivement en 5 ans et élargi successivement au pays de l’Europe du Sud-Est. La Slovénie adhère à l’ALECE en 1996, la Roumanie en 1997, la Bulgarie en 1998, la Croatie en 2003, la Macédoine (ARYM) en 2006, la Bosnie-Herzégovine, la Serbie, le Monténégro, la MINUK, l’Albanie ainsi que la Moldavie en 2007. En effet, l’ALECE a été conçue comme une organisation de transition préparant à une adhésion pleine et entière à l’Union européenne. En adhérant à l’UE le 1er mai 2004, les membres du groupe de Visegrad, ainsi que la Slovénie, quittent l’ALECE. En rejoignant l’UE le 1er janvier 2007, la Bulgarie et la Roumanie quittent à leur tour l’ALECE.
L’arrivée de la Slovaquie en 1993, sous la conduite d’un régime autoritaire, a entravé le bon fonctionnement du groupe et les relations du groupe avec l’Union européenne se sont détériorées. Au lieu d’œuvrer d’un commun effort pour défendre leurs intérêts communs lors des négociations d’adhésion avec l’UE, les pays V4 entrent en concurrence pour obtenir les faveurs de l’Union européenne en vue d’une adhésion rapide. Les changements de direction des pays du groupe de Visegrad en 1997 ont permis de revitaliser la coopération au sein du groupe et ont abouti le 21 octobre 1998 à la signature d’un nouveau texte sensé relancer le processus de collaboration. Cette coopération s’est concrétisée notamment dans l’adhésion des membres du Visegrad 4 à l’OTAN (1999). La Hongrie, la Pologne et la République tchèque ont ensuite soutenu la Slovaquie, moins avancée économiquement que ses partenaires, dans ses efforts d’adhérer à l’Union européenne au même moment que les autres membres du groupe.
Après leur adhésion à l’Union européenne, les États membres du V4 poursuivent leurs efforts pour parler d’une seule voix au sein de l’UE. Établir des liens spéciaux avec d’autres organisations régionales comme le Benelux, faire face à certains défis communs (émigration de leurs ressortissants vers l’Ouest et immigration ukrainienne et balkanique vers leurs régions) et élargir le champ de leur coopération dans les domaines de l’énergie, du tourisme ou de la justice, comptent parmi les priorités du groupe de Visegrad. De plus, le V4 a pour ambition de se coordonner afin de mieux peser sur les orientations de l’UE. Enfin, le groupe de Visegrad veut servir de modèle de transition démocratique pour les pays des Balkans.