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Les relations franco-allemandes d'après-guerre: Les prémices de la réconciliation (1945-1957)

La division de l'Allemagne


Le bilan humain et matériel de la Seconde Guerre mondiale est le plus grave que l'humanité ait jamais connu. Bien que le conflit ait une dimension mondiale encore plus accusée que la guerre 1914-1918, c'est bien l'Europe qui est la première victime de l'affrontement. Le nombre total des victimes est estimé à près de 40 millions, dont plus de la moitié parmi les populations civiles. Suite aux déportations et aux expulsions, il y a, en 1945, près de vingt millions de personnes déplacées et en attente d'être rapatriées. Les persécutions racistes, religieuses et politiques sans précédent et les déportations massives dans des camps de travail ou d'extermination ont attisé la haine entre peuples européens. La découverte des charniers humains dans les camps de concentration nazis apparait comme une remise en cause des fondements spirituels et moraux de la civilisation occidentale. Du reste, la population allemande se trouve accablée par un sentiment de culpabilité qui alimente un intense débat moral et ajoute au désarroi de la défaite.


Du 4 au 11 février 1945, Winston Churchill, Joseph Staline et Franklin D. Roosevelt se réunissent à Yalta, au bord de la mer Noire, en Crimée, afin de régler les problèmes posés par la défaite inéluctable des Allemands. Ils s'entendent tout d'abord sur les modalités d’occupation de l'Allemagne. Même si la France ne participe pas à la conférence, elle reçoit une zone d'occupation en Allemagne en partie prélevée sur celles du Royaume-Uni et des États-Unis. Ils adoptent aussi le principe d'un démembrement du territoire allemand. En ce qui concerne la Pologne, ils se mettent d’accord sur de nouvelles frontières. Le pays connaît un glissement vers l'Ouest en perdant des territoires à l'Est au profit de l'Union soviétique et en gagnant au contraire des provinces de l'Allemagne orientale, ce qui implique le transfert de plusieurs millions d'Allemands. Les trois chefs d'État signent également une "Déclaration sur la politique à suivre dans les régions libérées", texte qui prévoit l'organisation d'élections libres et la mise en place de gouvernements démocratiques. Yalta apparaît comme l'ultime tentative d'organiser le monde sur une base de coopération et d'entente.


Le monde n'est pas encore partagé en deux hémisphères d'influence, mais les Occidentaux sont contraints d'accepter le rôle de Staline dans les territoires libérés par les chars soviétiques. L'Europe centrale et orientale est désormais sous l'influence exclusive de l'Armée rouge. Il semble que Staline soit d'avis que chaque puissance finira par imposer son système politique là où elle exerce le contrôle militaire.


À la Conférence des chefs d'État de Potsdam, qui se déroule du 17 juillet au 2 août 1945, Harry Truman remplace Franklin D. Roosevelt, décédé le 12 avril 1945, et Clement Attlee remplace en cours de conférence Winston Churchill battu aux élections législatives britanniques du 26 juillet. Seul Joseph Staline participe en personne à toutes les conférences interalliées depuis Téhéran en novembre-décembre 1943. La Conférence de Potsdam, située au cœur de l'Allemagne, s'occupe principalement de la situation en Europe. Toutefois, elle ne règle que provisoirement le sort de l'Allemagne en décidant, entre autres choses, des modalités pratiques de son désarmement complet, de la destruction du parti national-socialiste, de l'épuration et du jugement des criminels de guerre et du montant des réparations. Les négociations concluent aussi à la nécessité d'une décartellisation des industries allemandes et à la mise sous séquestre des puissants Konzerns qui doivent être éclatés en plus petites sociétés indépendantes.


Au cours de l'année 1945, les Alliés commencent à organiser leurs zones d'occupation respectives en Allemagne et en Autriche. Les Américains occupent le sud, les Britanniques l'ouest et le nord, la France le sud-ouest et les Soviétiques le centre de l’Allemagne. Le côté oriental est administré par la Pologne, sauf la ville de Königsberg (rebaptisée Kaliningrad) et ses environs, incorporés à l'URSS. Le 30 août 1945, un Conseil de contrôle interallié est mis en place. Berlin est divisée en quatre secteurs et soumise au contrôle administratif de la Kommandatura interalliée. En 1946, les principaux criminels de guerre nazis sont jugés à Nuremberg par des juges alliés. Cette même année, le sort des satellites de l'Allemagne et celui de l’Italie, de la Bulgarie, de la Roumanie, de la Hongrie et de la Finlande, est réglé à Paris par des traités de paix séparés.


Le 28 juillet 1946, les États-Unis proposent un plan d'unification économique des zones d'occupation. Face au refus de la France et de l’Union soviétique, les Britanniques et les Américains décident d'unir économiquement leurs deux zones pour créer en décembre de la même année la Bizone. Le 1er août 1948, la zone d'occupation française intègre la Bizone qui devient donc une Trizone. Progressivement, l'entente entre les Alliés se détériore et les organismes quadripartites deviennent ingérables.


Du 20 avril au 2 juin 1948, les trois puissances se réunissent à Londres pour discuter de l'avenir du pays et décident de convoquer une assemblée constituante, le Conseil parlementaire allemand. Ses membres sont désignés par les parlements des États fédéraux, les Länder. Ces entités fédérales ont été créées par les puissances d'occupation en tenant plus ou moins compte des antécédents historiques. Tandis que l'État de Prusse est aboli par décision alliée, la Bavière est maintenue. Le 1er septembre 1948, le Conseil parlementaire commence ses travaux à Bonn. Il élit le démocrate-chrétien Konrad Adenauer à sa tête et élabore la Loi fondamentale qui est promulguée le 23 mai 1949. Cette loi représente la constitution provisoire de la République fédérale d'Allemagne (RFA). Son adoption par référendum donne lieu aux premières élections législatives pour l'ensemble de la Trizone. La ville de Bonn l'emporte sur Francfort comme capitale provisoire. La ville de Berlin-Ouest reçoit le statut de Land mais reste administrée par les Alliés. Il s'agit en effet de montrer que Berlin-Ouest fait partie de la RFA en dépit de son statut particulier.


Même si le droit de regard des puissances alliées occidentales limite encore la souveraineté allemande, la RFA se veut déjà la seule héritière légitime du Reich allemand, dissout lors de la capitulation sans condition de 1945. L'élection du Bundestag, en août 1949, consacre la victoire des chrétiens-démocrates (CDU) sur les socialistes (SPD) menés par Kurt Schumacher et dont certaines positions marxistes effraient parfois les occupants occidentaux. Les communistes et les libéraux ne récoltent que des résultats marginaux. La CDU, dirigée par Konrad Adenauer, s'affirme par contre comme le champion du retour de l'économie libérale. Adenauer, partenaire privilégié des Américains, devient le premier chancelier de la RFA.


En réaction à la fondation de la République fédérale d'Allemagne (RFA) à Bonn, l'URSS favorise, en octobre 1949, la proclamation de la République démocratique allemande (RDA) à Berlin. Berlin-Est devient aussitôt la capitale de la RDA. Les Occidentaux refusent de reconnaître cet État. Le Parti socialiste unifié (SED), parti stalinien, dirigé par des communistes, va dominer la vie politique de la RDA jusqu'à la fin du régime communiste en 1989.

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