Le Comité international de coordination des mouvements pour l'unité européenne

Le Comité international de coordination des mouvements pour l’unité européenne


C’est le 20 juillet 1947 qu’est créé à Paris le Comité de liaison des mouvements pour l’unité européenne. Il rassemble la Ligue indépendante de coopération européenne (LICE) de l’ancien Premier ministre belge Paul van Zeeland, l’Union européenne des fédéralistes (UEF) du néerlandais Henri Brugmans et l’United Europe Movement (UEM) de Winston Churchill. L’objectif de ce comité est de mieux organiser les efforts et les actions menées par chacun des mouvements qui le composent bien qu’ils conservent leur totale indépendance. Mais les différences idéologiques et les querelles de personnes rendent vite la tâche difficile. Ainsi le Mouvement pour les États-Unis socialistes d’Europe refuse-t-il de s’associer au Comité qu’il juge trop conservateur et favorable à une approche capitaliste de la construction européenne. De son côté, farouchement attachée à son indépendance, l'Union parlementaire européenne (UPE) qu'anime le comte Richard Coudenhove-Kalergi préfère se tenir à l'écart.


Or le besoin d'une meilleure coordination se fait chaque jour sentir davantage. C'est ce qui explique que, les 10 et 11 novembre 1947 à Paris, le Comité de liaison fait place à un Comité international de coordination des mouvements pour l’unité européenne (CICMUE). Le député et ancien ministre conservateur Duncan Sandys, gendre de Winston Churchill, en est le président tandis que le Polonais Joseph Retinger, cofondateur en 1946 de la LICE, occupe la fonction de secrétaire général. Le Comité de coordination a son siège à Londres mais un bureau de liaison est maintenu à Paris et dirigé par le secrétaire général adjoint Georges Rebattet. Le Comité a pour mission principale d’orchestrer et d’amplifier la campagne d’opinion en faveur de l’unité européenne. En font désormais aussi partie le Conseil français pour l’Europe unie, la LICE, les Nouvelles équipes internationales, l’UEF et l’UEM. Après beaucoup d'hésitations, l'UEP ne les imitera qu'en avril 1948.


Le jour même de sa création, le CICMUE de coordination décide de convoquer au printemps 1948 une conférence réunissant des Européens représentatifs des partis politiques et des forces vives de la société européenne. Il s’agit en effet de rassembler des personnalités européennes capables de donner vie à l’idée d’unité européenne et d’exercice en commun des souverainetés nationales. Mais d'emblée, l’United Europe Movement prend de facto les choses en mains pour piloter le futur congrès, ce qui ne sera pas sans conséquences sur le rôle des militants fédéralistes. Car dans l'esprit des leaders fédéralistes, le congrès doit revêtir le caractère de véritables "États généraux" disposant d'une légitimité et de l'autorité nécessaires pour élaborer un projet de Constitution fédérale sans tenir compte d'aucun carcan "possibiliste". La Haye ayant été entre-temps choisie comme lieu de réunion, le sénateur et ancien ministre catholique néerlandais Pieter Kerstens, vice-président de la LICE, est désigné comme président du comité d’organisation.


Le 14 décembre, un Joint Committee est également créé à Londres qui assure en pratique toute l’organisation du congrès pour l’Europe de La Haye. Il lance et contrôle les invitations. Aussitôt méfiants par rapport à l'emprise des Britanniques sur l'organisation du congrès, les fédéralistes craignent une récupération politique. Ils cherchent donc à impliquer une personnalité susceptible de faire contrepoids à la figure de Churchill. Mais discrètement contacté, Paul-Henri Spaak, qui cumule les fonctions de Premier ministre et de ministre des Affaires étrangères de Belgique, décline la sollicitation fédéraliste en mettant en avant la crise ministérielle que traverse le pays. De plus, marqués depuis l'entre-deux-guerres par la pensée personnaliste, les fédéralistes se méfient des partis politiques. Mais rien n'y fait, le Comité international n'échappe pas aux tensions internes nées de l'opposition entre les conservateurs et les travaillistes britanniques.


L’objectif assigné au congrès est triple: prouver l’existence dans tous les pays libres d’Europe d’un mouvement d’opinion en faveur de l’unité européenne, discuter les enjeux de l’unité européenne et proposer aux gouvernements des solutions pratiques, insuffler une vigueur nouvelle à la campagne internationale d’opinion. Pour éviter que le congrès ne dégénère en un grand palabre sans effet pratique, le comité de coordination crée trois commissions. La commission politique est placée sous la présidence de l’ancien président du Conseil des ministres français Paul Ramadier, la commission économique et sociale est présidée par Paul van Zeeland et la commission culturelle, après le désistement de l’écrivain italien Ignazio Silone, membre du Movimento federalista europeo, est présidée par l’écrivain espagnol et ancien ambassadeur républicain Salvador de Madariaga. Les travaux de chacune des commissions font l’objet d’une série de réunions préparatoires qui réunissent des centaines d’experts et des dirigeants politiques.


Le congrès pour l’Europe se réunit à La Haye du 7 au 10 mai 1948. Au terme de leurs travaux, les congressistes lancent un ambitieux Message aux Européens et adoptent trois résolutions que le Comité international de coordination des mouvements pour l'unité européenne se charge de concrétiser. Pour ce faire, il donne naissance, le 25 octobre 1948 à Bruxelles au Mouvement européen.

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