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Les dispositions du traité d'Amsterdam

Les dispositions du traité d'Amsterdam


Les innovations les plus marquantes du traité d’Amsterdam se situent dans le domaine des rapports de l’Union européenne avec ses citoyens. Les droits de l’homme sont explicitement mentionnés ainsi que les principes de liberté, de démocratie et d’État de droit. Leur respect devient une condition d’adhésion à l’Union. Les manquements pourront être sanctionnés par le Conseil. Pour répondre aux préoccupations des citoyens, les politiques communautaires de l’environnement, de la santé et de la défense des consommateurs sont renforcées. Le rôle des « services d’intérêt économique général » - c’est-à-dire les services publics – est reconnu. Un chapitre sur l’emploi est inséré prévoyant l’examen comparé des situations dans les pays membres, qui conservent leur compétence nationale dans ce domaine, et l’adoption de mesures incitatives. Le protocole social, adopté par les Onze en annexe au traité sur l'Union européenne, est cette fois intégré au traité grâce à son acceptation par le nouveau gouvernement travailliste en Grande-Bretagne. Il se borne d’ailleurs à énoncer des principes (promotion de l’emploi, protection sociale, lutte contre l’exclusion et amélioration des conditions de vie et de travail) que les États s’engagent à appliquer en tenant compte de la diversité des pratiques nationales. L’unanimité est maintenue pour les mesures visant la sécurité sociale et les relations employeurs-employés. Un très grand progrès est réalisé dans le domaine de la protection des citoyens par la décision d’instaurer un « espace de liberté, de sécurité et de justice » à l’échelle de l’Union européenne.


En revanche, très peu de progrès sont réalisés dans les autres domaines. Le deuxième pilier "Politique étrangère et de sécurité commune" (PESC) reste intergouvernemental. Alors que son renforcement était souhaité pour permettre à l’Union de jouer un rôle accru vis-à-vis de l’extérieur, des modifications mineures visent à améliorer son fonctionnement: possibilité pour le Conseil européen de définir des « stratégies communes », création d’une « unité de planification et d’alerte rapide » et institution d’un « Monsieur PESC » pour assister la présidence semestrielle qui reste responsable de la mise en œuvre de celle-ci. Mais la règle de l’unanimité persiste, à peine atténuée par la possibilité d’« abstention constructive » pour permettre aux États hostiles à une décision de ne pas empêcher les autres de la prendre mais de ne pas être tenus de l’appliquer. Même pour les mesures d’exécution, prises à la majorité qualifiée, le droit de veto persiste en fait. Quant à l’intégration de l’Union de l'Europe occidentale (UEO), « bras armé » de l’Union européenne, elle n’est toujours pas décidée, en raison de l’opposition du Royaume-Uni et du Danemark – qui refusent de sortir du cadre de l’Organisation du traité de l'Atlantique Nord (OTAN) – et des pays neutres qui ne veulent pas que l’Union européenne comporte des obligations militaires, alors qu’un échéancier progressif avait été proposé par la France, l’Allemagne, l’Italie, l’Espagne, la Belgique et le Luxembourg.


Quant aux institutions de l’Union, des progrès sont réalisés dans la voie de la démocratisation avec l’extension des pouvoirs du Parlement européen. La codécision législative avec le Conseil est étendue à des domaines nouveaux et sa procédure est simplifiée. Le Parlement donne désormais son approbation, et non plus un simple avis, à la désignation du président de la Commission par les gouvernements et ceux-ci doivent le consulter pour la nomination des autres commissaires. Dans la perspective du nouvel élargissement, l’effectif du Parlement est plafonné à 700 députés. La Commission est renforcée sur le plan politique par le rôle accru du Parlement dans la désignation de son président et de ses membres. L’autorité de celui-ci sur le collège est reconnue en ce qui concerne la répartition des postes et la réorganisation des services. Au Conseil des ministres, le vote majoritaire pour le premier pilier communautaire, qui a été largement étendu par Maastricht, ne progresse guère du fait des réticences de l’Allemagne. Il est même rendu plus difficile puisque, lors de l’élargissement de Douze à Quinze et de la nouvelle répartition des voix au Conseil, la détermination de la minorité de blocage n’a pas été modifiée, rendant celui-ci plus facile, en raison de l’exigence de la Grande-Bretagne, soucieuse d’affaiblir le caractère supranational, et de l’Espagne qui tenait à pouvoir s’opposer à toute mesure de nature à réduire les aides régionales qu’elle reçoit de la Communauté européenne, sous le prétexte d’éviter que les pays du Nord ne puissent dominer ceux du Sud.


Ainsi le traité d’Amsterdam – et c’est sa plus grave lacune – n’apporte pas de solution au problème central de l’efficacité du processus de décision dans une Union passée de douze à quinze et devant bientôt s’élargir à une douzaine d’autres États. Il apparaît nécessaire de limiter le nombre de membres de la Commission afin de maintenir la cohésion et l’efficacité de celle-ci et de modifier la pondération des voix pour éviter qu’une éventuelle majorité de petits États ne puisse se former contre les grands États, les plus importants démographiquement, économiquement et politiquement. Or, les deux problèmes sont liés : les « grands » auraient, dans une commission restreinte, accepté d’avoir chacun un commissaire au lieu de deux à condition que la repondération des voix au Conseil tienne compte de l’importance démographique des différents pays, mais les « petits » pays tiennent avant tout à disposer chacun d’un commissaire. Il n’a donc pas été possible de s’entendre. Tout au plus un protocole annexé au traité d’Amsterdam prévoit-il qu’avec tout nouvel élargissement « la Commission se composera d’un national de chacun des États membres à condition qu’à cette date, la pondération des voix au sein du Conseil ait été modifiée d’une manière acceptable pour tous les États membres… ». Une réforme plus ample devra avoir lieu plus tard, « un an au moins avant que l’Union européenne ne compte plus de vingt États membres », mais les modalités ne sont pas précisées.


Ainsi la réforme éventuelle des institutions n’est plus envisagée qu’au cours de l'élargissement de l'Union européenne et non plus avant celui-ci. D’où la réaction des gouvernements de la Belgique, de la France et de l’Italie qui, à la signature du traité le 2 octobre 1997 à Amsterdam, publient une déclaration affirmant le renforcement « indispensable à la conclusion des premières négociations d’adhésion », c’est-à-dire en en faisant un préalable et une condition des nouveaux élargissements. Ce qui ne sera d’ailleurs pas réalisé. En attendant, pour permettre aux États désireux d’aller plus loin d'avancer dans la voie de l’intégration et de former une « avant-garde », le traité prévoit la possibilité de « coopérations renforcées » pour le premier et le troisième pilier (et non le second PESC), mais à des conditions si restrictives en raison des résistances britanniques que leur utilisation apparaît bien difficile.

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