La signature et la ratification du traité de Nice

La signature et la ratification du traité de Nice


Le traité de Nice est signé le 26 février 2001 après que les diplomates aient vérifié toutes les données chiffrées et réussi à élaborer un texte définitif.


Mais le processus de ratification commence mal. Ainsi en Irlande, le premier pays à se prononcer, le 7 juin 2001, le « non » l’emporte par 54 % avec 68 % d’abstentions. Ce résultat inattendu est dû à l’absence de campagne menée par le gouvernement et les élites politiques favorables, croyant que le résultat était acquis d’avance et laissant ainsi le champ libre à une coalition hétéroclite (neutralistes, écologistes, extrême-droite religieuse). Aussitôt, les dirigeants de l’Union européenne, craignant la contagion à d’autres pays, déclarent que toute renégociation du Traité de Nice est exclue et que le calendrier des adhésions de nouveaux membres est maintenu. Le gouvernement irlandais ne demande pas à renégocier mais il tient à réparer son erreur. Le Premier ministre Bertie Ahern, réélu le 17 mai 2002, fait un gros effort d’information. Ses partenaires européens l’aident avec la déclaration du Conseil européen de Séville (21 juin) garantissant la neutralité de l’Irlande alors que l’Union commence à élaborer une Politique étrangère et de défense commune. Un second référendum, le 19 octobre, voit cette fois le « oui » l'emporter avec 62,9 % des voix grâce à la participation massive des abstentionnistes alors que le nombre de « non » reste stable.


Les autres ratifications, toutes par voie parlementaire, se déroulent sans difficultés majeures. Elles s'étalent du 13 juin 2001 (Danemark) au 18 décembre 2002 (Irlande). Le Traité de Nice entre en vigueur le 1er février 2003. Plusieurs de ses modalités institutionnelles seront appliquées en fonction de l’élargissement et des élections européennes.


Au total, le bilan de la Conférence intergouvernementale et du Traité de Nice répond mal à l’objectif de rendre l’Union capable de s’élargir sans perdre de son efficacité. Les grands États, qui voulaient renforcer leur poids dans les institutions, ont fait le sacrifice de leur second commissaire sans pour autant obtenir un accroissement relatif suffisant du nombre de leurs voix au Conseil, où les nombreux petits États sont sur-représentés, comme à la Commission et au Parlement. Les prises de décision seront plus difficiles à 27 qu’à 15, en même temps que le caractère hétérogène de l’Union s’accroîtra encore.


Si l’intérêt général n’a guère été pris en compte, les intérêts particuliers sont inégalement satisfaits. Pour les Britanniques, c’est un « nice treaty » qui leur permet de conserver le veto sur les matières qu’ils estiment essentielles et le caractère intergouvernemental de la Politique étrangère de sécurité et défense en voie de construction. Les Espagnols et les Polonais sont heureux d’avoir un statut de « presque » grands. L’Allemagne n’a pas obtenu les quelques voix – ou même la voix symbolique – qu’elle réclamait au Conseil en raison de sa supériorité démographique mais elle a gagné la possibilité de faire prendre en compte celle-ci par l’exigence de 62 % de la population de l’Union pour valider les décisions du Conseil à la majorité pondérée. De plus, l’Allemagne est le seul État membre à ne pas voir réduite sa représentation au Parlement européen – déjà augmentée après la réunification – pour le passage de 15 à 27. Surtout, c’est l’Allemagne qui est apparue la plus déterminée à progresser dans la voie de l’intégration politique en imposant la réunion d’une nouvelle Conférence intergouvernementale (CIG). En revanche, la France, tout en maintenant une parité formelle avec l’Allemagne au Conseil, voit sa position affaiblie en donnant l’impression de s’accrocher au statu quo sans proposer de vision d’avenir comme cela avait été le cas dans le passé. De toute façon, le couple franco-allemand n’a pas joué son rôle d’impulsion et reste à reconstruire.


Après Nice, les dirigeants allemands et français vont réagir pour rétablir leurs bons rapports, rapprocher leurs positions et chercher à parler d’une voix commune. Dès le 30 janvier 2001, Joschka Fischer, ministre allemand des Affaires étrangères, déclare que « l’intégration européenne ne peut réussir et ne réussira que si la France et l’Allemagne en font une cause commune ». Le président français Jacques Chirac lui répond le 21 février en évoquant la nécessaire capacité des deux pays à « entraîner l’ensemble européen ». De fait, c’est l’accord des deux pays qui va permettre la mise en place de la Convention sur l’avenir de l’Europe qui va élaborer un projet de Constitution européenne dans la perspective de la nouvelle CIG prévue pour 2004.


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