Les GOPE

Depuis le traité de Rome établissant la Communauté économique européenne, le Conseil a parmi ses responsabilités la coordination des politiques économiques des États membres1. Cette fonction est confirmée et renforcée par le traité de Maastricht. Afin d'organiser cette coordination, le Conseil adopte des mesures, notamment les grandes orientations de ces politiques. Le traité de Lisbonne étend le pouvoir de coordination du Conseil aux mesures propres aux États membres de la zone euro2.

La coordination des politiques économiques se décompose en deux dispositifs complémentaires: la formulation d'un cadre de référence commun pour la définition et la conduite des politiques économiques des États membres et de l'Union: les grandes orientations des politiques économiques (GOPE); et un régime de surveillance garantissant le respect des GOPE par les États membres. Le régime de surveillance sert de point d'appui pour la prévention des déficits budgétaires et d'un endettement public excessif, ainsi que pour la prévention des déséquilibres macroéconomiques. Ces dispositifs sont définis à l'article 121 du traité FUE et précisés par une résolution du Conseil européen de juin 1997, un règlement du Conseil et un code de bonne conduite élaboré par le comité économique et financier.

L'élaboration des GOPE

L'adoption des GOPE mobilise principalement les institutions de nature intergouvernementale. Le Conseil, sur recommandation de la Commission, élabore un projet pour les GOPE et en fait rapport au Conseil européen. Celui-ci débat sur cette base d'une conclusion sur les GOPE, laquelle est ensuite «traduite» juridiquement par le Conseil sous la forme d'une recommandation. Le Conseil informe le Parlement européen de sa recommandation. Les GOPE sont dépourvues de valeur juridique. Elles comprennent une série de lignes directrices portant sur les politiques macroéconomiques et les actions d’ordre microéconomique. Certaines s’adressent aux États membres, d’autres à la Communauté dans son ensemble. Adoptées à partir du début de la deuxième phase de l'UEM (1er janvier 1994)3 selon un rythme annuel, elles sont formulées pour une période de trois ans depuis 2003. Les premières GOPE couvrant une période triennale (2003-2005) comportent comme autre nouveauté une section consacrée aux défis propres à la zone euro. Le traité de Lisbonne constitutionnalise cette pratique et autorise le Conseil à élaborer, pour ce qui concerne les États membres de la zone euro, des orientations de politique économique. Celles-ci doivent être compatibles avec les GOPE générales. Seuls les représentants des États membres de la zone euro prennent part au vote de ces mesures particulières4. En complément de ces orientations prises dans le cadre de l'Union, les États membres signataires du Pacte pour l'Euro Plus de mars 2011 prennent une série d'engagements dans le domaine de la compétitivité. Ces engagements sont intégrés dans les documents à remettre au titre de la surveillance multilatérale et leur mise en oeuvre examinée dans le cadre de surveillance régulier par les chefs d'État ou de gouvernement des pays signataires.



La surveillance des GOPE

La surveillance de la mise en œuvre des GOPE a pour objet d'assurer une coordination plus étroite et une convergence soutenue des performances économiques des États membres. Elle se déroule selon un rythme annuel et porte, depuis des réformes intervenues en 2011 et en 2013, sur les politiques en cours et celles envisagées. La procédure se développe selon une division de l'année civile en deux semestres. Le premier semestre dit «semestre européen» est consacré à la surveillance par l'Union européenne des politiques économiques nationales et communautaires. Le deuxième semestre dit «semestre national» correspond au temps laissé aux États membres pour l'exécution des orientations ou des recommandations qui leur sont adressées.

L'exercice de la surveillance exige de tous les États membres qu'ils présentent une série d'informations macroéconomiques, budgétaires et sociales, dont les objectifs budgétaires et macroéconomiques à court et moyen terme et les stratégies prévues pour réaliser ces objectifs. L'ensemble de ces informations sont rassemblées dans un programme d'action qui comprend deux documents distincts. Le premier, appelé «programme de stabilité» lorsque son auteur est un État membre de la zone euro, et «programme de convergence» dans le cas contraire, porte sur les aspects budgétaires. Le second, appelé programme national de réforme, traite des aspects macroéconomiques, d'ordre structurel et sociaux. Couvrant une période de trois ans, ce programme d'action fait l'objet d'une actualisation annuelle sur la base des résultats de la surveillance multilatérale.

Sur la base de l'examen annuel de croissance, le Conseil adopte des conclusions qu'il soumet au Conseil européen de mars de l'année N. Celui-ci recense les principaux défis économiques et formule des conseils stratégiques sur les politiques à suivre. Les États membres sont invités à réviser d’ici la mi-avril leurs stratégies budgétaires à moyen terme au regard de ces objectifs ; ils doivent élaborer dans le même temps leurs programmes nationaux de réforme qui décrivent les mesures envisagées dans les domaines de l’emploi et de l’inclusion sociale. Le Conseil européen de juin discute des projets de recommandations pour chaque pays sur les politiques à suivre. Le Conseil arrêtent formellement les recommandations individuelles. Ils se fondent sur les projets de recommandation établis par la Commission. Les recommandations sont des actes juridiques non contraignants.

Lorsqu'il est constaté dans le cadre de cette surveillance multilatérale que les politiques économiques d'un État membre ne sont pas conformes aux GOPE ou qu'elles risquent de compromettre le bon fonctionnement de l'UEM, la Commission peut adresser un avertissement à l’État membre concerné. Au cas où l'avertissement demeure sans effet, la Commission recommande au Conseil l'adoption d'une recommandation invitant l’État membre à corriger sa situation dans un certain délai (cinq mois au maximum). Si au terme de ce délai aucune amélioration n’est constatée, le Conseil constate l'absence de mesures effectives et peut adopter une nouvelle recommandation et décider de la rendre publique.

Depuis les réformes de 2010, un régime de sanction administrative s'applique à l'égard des États membres de la zone euro qui ne réalisent pas les corrections demandées en application de la surveillance multilatérale. Les sanctions administratives prennent la forme d'un dépôt portant intérêt d'un montant maximum égal à 0,2 % du PIB enregistré l'année précédente.

Par ailleurs, une surveillance complémentaire dans le domaine budgétaire s'applique aux États membres de la zone euro depuis mai 2013, en application du «Two Pack»



1Article 145 du traité CEE.

2Article 136 du traité FUE.

3Une procédure d'adoption, par le Conseil, de recommandations de la politique économique à suivre par la Communauté et dans chaque État membre et de surveillance de leur mise en œuvre existait auparavant, en application de la décision (74/120/CEE) du Conseil du 18 février 1974 relative à la réalisation d'un degré élevé de convergence des politiques économiques des États membres de la Communauté économique européenne, Journal officiel n°L 63 du 5 mars 1974, p. 16.

4Article 136, paragraphe 1, du traité FUE.

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