Extrait du compte rendu de la 108e réunion du Conseil de l’UEO (12 février 1958)

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Réuni le 12 février 1958, le Conseil de l’Union de l’Europe occidentale (UEO) analyse la coopération franco-germano-italienne en matière de production des armements. Une déclaration a été faite au nom des trois gouvernements et le représentant français Jean Chauvel a communiqué la position de la France concernant la contribution européenne à la coopération atlantique dans le domaine des armements. Au vu des difficultés financières, techniques et industrielles, la production des systèmes d'armes ne peut se faire seulement à l'échelle nationale, la France propose donc un programme régional commun. Celui-ci souligne, entre autres, la nécessité d’harmoniser les conceptions militaires concernant l'organisation, les doctrines d'emploi et l'armement des forces armées avec les directives de l’Organisation du traité de l’Atlantique Nord (OTAN), dans l'intérêt d'une défense commune.

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Quelle: Conseil de l'Union de l'Europe occidentale. Extrait du compte rendu de la 108e réunion du Conseil de l’UEO tenue le 12 février1958. Coopération franco-germano-italienne en matière de production d'armements . CR (58)6. pp. [s.p]; 3-7.

Archives nationales de Luxembourg (ANLux). http://www.anlux.lu. Western European Union Archives. Secretariat-General/Council’s Archives. 1954-1987. Subjects dealt with by various WEU organs. Year: 1958, 01/06/1957-30/04/1958. File 442.00. Volume 1/4.

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I. COOPERATION FRANCO-GERMANO-ITALIENNE EN MATIERE DE
PRODUCTION D 'ARMEMENTS

M. ZOPPI fait la déclaration suivante au nom des
gouvernements français, allemand et italien :

" En raison de la similitude de certains besoins
en matière d'armements, une étroite collaboration dans les
domaines de la recherche, de l'étude et de la production
d'armes a été établie entre l'Allemagne , la France et l'Italie
dans le cadre des principes de coordination indiqués par la
Conférence des Chefs de Gouvernement de l'O.T.A.N. du
16 au 19 décembre 1957.

Pour définir en commun les principes, la procédure
et les modalités pratiques de fonctionnement de cette colla-
boration
, les Ministres de la défense se sont réunis à Bonn
le 21 janvier.

Ils ont décidé de confier à un comité directeur
tripartite le soin de déterminer les types d'armements
nécessaires aux forces armées des trois pays pour lesquels
ceux-ci sont décidés à collaborer en matière d'études, de
recherches et de fabrications. Le comité directeur sera
assisté par des sous-comités ad hoc.

Cette collaboration pourra notamment s'étendre à
tous les types d'armements correspondant aux doctrines
définies par l'O.T.A.N. et aux systèmes d'armes recommandés
par l'organisation, les études scientifiques dans le domaine
des utilisations militaires de l'énergie nucléaire n'en sont
pas exclues. Aucune décision n'a toutefois été prise à
leur sujet. Toute décision ultérieure les concernant se
placerait naturellement dans le respect des accords de Paris.

La première réunion du comité directeur a eu
lieu le 6 février à Rome.

Les comités d'armements de l'U.E.O. et de l'O.T.A.N.
seront informés des types d'armements intéressant les trois
pays dans l'espoir que d'autres pays voudront participer aux
études, recherches et fabrications de ces types d'armements."

M. CHAUVEL rappelle que son Gouvernement a fait,
lors de la réunion des ministres de l'O.T.A.N. en décembre 1957,
une déclaration préliminaire se rapportant au problème qui
occupe le Conseil puisqu'elle traite de la contribution
européenne à la coopération atlantique dans le domaine des
armements. Pour répondre aux demandes d'informations formulées
au sein du Conseil, M. Chauvel a été autorisé à communiquer
le texte de cette déclaration :

.../...
U.E.O. SECRET

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U.E.O. SECRET
CR (58) 6

" La réalisation des programmes d'armement, en parti-
culier
dans le domaine des armes nouvelles, pose pour tous
les pays de l'O.T.A.N. des problèmes de plus en plus complexes.

Du point de vue économique et financier, les pays
européens ne peuvent se satisfaire d'une situation qui les
obligerait à acheter à l'extérieur de leurs frontières la
majeure partie des armes qui leur sont nécessaires. Mais la
production des systèmes d'armes par chaque nation pose des
problèmes techniques, industriels et financiers qui ne
pourraient être résolus de façon satisfaisante par des pays
agissant isolément.

Du point de vue militaire, il est de la plus haute
importance, pour faciliter la mise en oeuvre des armes sur
le théâtre d'opérations européen, que les pays de l'Europe
construisent des systèmes d'armes unifiés, ou au moins compa-
tibles
entre eux.

Du point de vue industriel, la similitude des normes
entre certains pays est un facteur favorable pour l'établis-
sement
d'une coopération plus étroite entre eux.

Le Gouvernement français propose donc de mettre en
oeuvre, compte tenu des accords généraux et particuliers en
vigueur entre les pays de l'O.T.A.N. et dans l'intérêt de
la défense commune, un programme régional commun ayant pour
but :

- d'harmoniser en conformité avec les directives de l'O.T.A.N.
les conceptions militaires concernant l'organisation, les
doctrines d'emploi et l'armement des forces armées, et de créer
les moyens de combat nécessaires pour réaliser ces concep-
tions
, en particulier en ce qui concerne les systèmes
d'armes aéronautiques et les systèmes d'engins ;

- d'entreprendre dès maintenant des études communes de maté-
riel
d'armement répondant à des caractéristiques générales
approuvées en commun, ainsi que dos recherches techniques
dans les domaines reconnus comme présentant un intérêt
commun pour la mise au point de matériels nouveaux ou
existant dans d'autres pays, de procéder à cet effet aux
opérations suivantes :

- recensement des études et projets de matériel
d'intérêt commun,

- choix commun des études à poursuivre,

- répartition équitable des études,

et de conclure les accords d'exécution correspondants ,

- de promouvoir un programme commun de choix et de fabrication
des armements conduisant à une standardisation de ces arme-
ments
et à l'utilisation rationnelle en commun des moyens
techniques et industriels; de procéder à cet effet aux
opérations suivantes :

... / ...
U.E.O. SECRET

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U.E.O. SECRET
CR (58) 6

- recensement des matériels existants,

- choix commun des matériels à fabriquer en série,

- répartition équitable des tâches de fabrication
entre les parties,

et de conclure les accords d'exécution correspondants ;

- de mettre au point les procédures pour la préparation, la
passation et l'exécution des contrats d'études et des
marchés de fabrication ;

- d'examiner les modalités suivant lesquelles devraient
être créés des fonds communs réservés à chaque projet
particulier exécuté en commun entre un certain nombre
de pays.

Le Gouvernement français se propose de mettre à la
disposition de l'organisation envisagée un centre d'essai
technique et a celle de l'Alliance un centre d'entraînement
aux engins.

Il convient de souligner que ce programme régional
ne pourra atteindre les objectifs fixés que s'il reçoit le
soutien et un concours actif de tous les autres pays membres
de l'O.T.A.N.
, et notamment des Etats-Unis, dont l'aide
pourrait avoir ainsi une efficacité accrue.

Le Gouvernement français désirerait savoir si les
autres pays seraient désireux de participer à ce programme,
et propose que les représentants des pays intéressés se
réunissent au cours de la deuxième quinzaine de janvier 1958
pour définir en commun les principes, la procédure et les
modalités pratiques de fonctionnement. "

M. CHAUVEL ajoute, en ce qui concerne la déclaration
faite par M. Zoppi, que la mise en oeuvre de la coopération
envisagée est analogue à celle qui fut instaurée sur le plan
bilatéral par plusieurs gouvernements membres. Les résultats
de cette coopération seraient communiqués à l'U.E.O. et à
l'O.T.A.N. et les membres de ces deux organisations seront
invités à s'y associer.

M. von HERWARTH n'a rien à ajouter à la déclaration
faite par l'ambassadeur d'Italie.

Les autres délégations se joignent à Sir
Anthony RUMBOLD
pour exprimer leur satisfaction de cette
communication.

Sir Anthony Rumbold pose trois questions :

.../...
U.E.O. SECRET

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CR (58) 6

1. La coopération envisagée par les trois gouvernements
fait-elle l'objet d'un accord formel ou d'un simple mémo-
randum
? les accords anglo-allemand et anglo-français reposent
sur de tels mémorandums; un document semblable sera proba-
blement
rédigé pour l'accord anglo-néerlandais;
à son avis,
ces documents devraient être mis à la disposition du Conseil
et son Gouvernement a l'intention de proposer à ses parte-
naires
dans les accords bilatéraux de communiquer les textes
de base à celui-ci.
Il demande si l'on pourrait faire de
même pour l'arrangement tripartite.

Les ambassadeurs de FRANCE, d'ALLEMAGNE et d'ITALIE
transmettront cette demande à leurs gouvernements.

2. Sir Anthony RUMBOLD rappelant que la coopération
tripartite pouvait se rapporter à tous types d'armements,
demande s'il est possible d'indiquer les types qu'il a
proposé de traiter en premier lieu.

M. von HERWARTH croit que la coopération envisagée
portera sur les fusées, les engins guidés, les avions, les
besoins des forces terrestres en armes de type classique,
les besoins de la marine. En ce qui concerne l'énergie ato-
mique
, le Gouvernement fédéral s'intéresse principalement
aux recherches dans le domaine de la propulsion des sous-marins
et des autres navires.

M. CHAUVEL précise que la liste constitue en quelque
sorte une délimitation du cadre de la coopération tripartite,
ce qui n'implique pas que toutes les armes qui y figurent
seront étudiées en même temps. On recherchera sans doute
quelles sont les armes dont l'étude en commun pourrait pré-
senter
le plus grand intérêt.

M. von HERWARTH se rallie à cette opinion. Il rappelle
que l'accord anglo-allemand englobe tous les armements, dont
certains seulement seront retenus pour étude. Sur ce point,
la coopération tripartite n'est pas sans analogie avec les
accords bilatéraux.

3. En ce qui concerne le dernier alinéa de la déclara-
tion
de M. Zoppi relatif à l'élargissement possible de la
coopération tripartite, Sir Anthony RUMBOLD rappelle les
observations faites par M. Cristofini lors de la dernière
réunion au sujet de la difficulté d'étendre à d'autres pays
membres
les résultats de la coopération bilatérale. Les
trois gouvernements ont-ils envisagé une méthode permettant
d'élargir leur coopération et ont-ils une opinion sur le
stade auquel il faudrait procéder à cette extension ?

M. ZOPPI ne croit pas que les trois gouvernements
aient déjà envisagé une méthode précise. Toutefois, la coopé-
ration
tripartite représente, en soi, un progrès par rapport
aux accords bilatéraux. En effet, dès qu'un accord sera inter-

.../ ...
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venu sur les types d'armes intéressant les trois gouvernements,
l'U.E.O. et l'O.T.A.N. en seront informées afin de permettre
à d'autres de se joindre aux trois.

M. STIKKER est convaincu que son Gouvernement
examinera cette déclaration avec le plus grand intérêt.
Rappelant les observations faites par M. Cristofini à la
dernière réunion du Conseil au sujet des difficultés qui
s'opposent à la production en commun d'armements, il déclare
avoir toujours pensé que toute entente devait donc être aussi
souple que possible.

Cependant, l'intention a toujours été de situer
la coopération bilatérale dans le cadre de l'U.E.O. et de
l'O.T.A.N. M. Stikker rappelle que les ministres ont expres-
sément
déclaré que l'accord anglo-néerlandais, qui d'ailleurs
ne se rapporte pas à tous les types d'armements, s'inscrive
dans ce cadre. Il espère très vivement que, conformément à
l'esprit des accords de l'U.E.O. tel qu'il s'exprime dans le
mandat du Comité permanent des armements, l'accord tripartite
s'intégrera dans ce même cadre. Si tel était le cas et si le

C.P.A. était en conséquence informé de tout progrès réalisé,
cela contibuerait beaucoup à faciliter l'association d'autres
pays, au moment opportun, aux travaux des trois gouvernements.
M. Stikker estime qu'il y a là une question de principe de la
plus haute importance et serait heureux de toute précision à
cet égard.

M. von HERWARTH pense pouvoir répondre à cette ques-
tion
en se référant aux instructions qu'il a reçues en ce
qui concerne les renseignements à donner le cas échéant à
la presse; d'après ces instructions, il y a lieu de déclarer
en réponse à toutes questions posées, que l'accord tripartite
rentre avec les accords de l' U.E.O. et de l'O.T.A.N.

M. CHAMPENOIS déclare que la plupart des points
qu'il se proposait de soulever avaient déjà été traités au
cours de la discussion. L'accord tripartite a suscité auprès
de son Gouvernement beaucoup de curiosité, voire de perplexité,
et il a été chargé de demander s'il ne serait pas possible
d'avoir communication du texte de l'accord. Il croit comprendre
cependant qu'il n'existe pas de texte mais, il estime comme
Sir Anthony Rumbold, qu'il serait très utile que tout mémo-
randum
établi en commun soit porté à la connaissance du Conseil.
Son Gouvernement s'intéresse particulièrement à la question
de l'intégration de l'accord tripartite dans le cadre de
l'U.E.O. et de l'O.T.A.N. et aux catégories d'armements sur
lesquelles portera la coopération. Il rappelle les remarques
qu'il a faites à la dernière réunion au sujet de la difficulté
qu'éprouvent certains pays à apporter une contribution utile
à une extension de la coopération bilatérale, du fait qu'ils
ne sont pas suffisamment informés des domaines sur lesquels
elle porte.

Le CONSEIL

PREND NOTE de la déclaration faite au nom
des gouvernements allemand, français et
italien
.

.../...
U.E.O. SECRET